Moment unique de prière que nous venons de vivre autour de Mgr Aupetit ce soir en l’église Saint-Sulpice comble. Nous savions que cette célébration importante constituerait un point d’orgue des quatre années d’épiscopat dans la capitale et symboliserait la reconnaissance de tout le peuple de Dieu pour le serviteur de l’Eglise contraint à la démission.
Dès la première minute, lors de son entrée dans l’église, les applaudissements ont salué Mgr Aupetit. Le chant ancien, « Seigneur, rassemble-nous dans la paix de ton amour » était approprié. Douze évêques et de centaines de prêtres et diacres allaient concélébrer cette messe introduite par Mgr Georges Pontier, administrateur apostolique de Paris. L’ancien archevêque de Marseille a rappelé que le cardinal Vingt-Trois souhaitait participer à cette messe, mais son état de santé ne l’a pas permis. En réponse, Mgr Aupetit a exprimé son émotion devant cette foule en saluant ses frères évêques d’Ile de France et « au-delà d’ile de France». Conscient de représenter les Eglises d’outre-mer, à la sacristie, je lui ai transmis les messages fraternels des confrères des îles. Un Kyrie saisissant chanté par Musique sacrée à ND nous plongeait dans cette dimension pénitentielle personnelle et communautaire, comme nous le vivons en chaque Eucharistie.
Après les lectures du jour, Isaïe et Matthieu parlant de la Sagesse de Dieu., l’homélie. Suivant son habitude, Mgr Aupetit a commencé par un long silence, suivi de sa méditation avec allusion au titre d’un article à charge avec un titre, « Perdu par amour ». Sourires et applaudissements. Il a évoqué le ie risque de l’amour avec une explication spirituelle. Oui, se perdre par amour. Lui, d’abord médecin, puis prêtre à 45 ans, évêque a vécu de cet amour pour tous en annonçant l’Amour de Dieu.
La liturgie se déploie dans le cadre majestueux de cette église avec deux chants à la communion, dont le superbe « Anima Christina » de Frisina. Comme des dizaines de célébrants, je donne la communion à de nombreux fidèles de tous âges, reconnaissant même certains fidèles, connus à Notre-Dame de Paris ou à Saint Fedinand.
Remerciements par l’archevêque émérite avec son témoignage d’affection pour tous, particulièrement les handicapés et les pauvres. Applaudissements. Nous sommes tous passés de cette entrée dans la gravité devant ce départ rapide de Paris à la paix, comme Mgr Aupetit l’a écrit dans son message du 2 Décembre : « Je rends grâces à Dieu d’avoir le cœur profondément en paix. » Et il avait aussi souligné qu’il « restait profondément uni » et rappelant le message de sa toute première homélie : « Ne regardez pas l’archevêque, regardez le Christ. »
Dans le métro, la messe se poursuit par les échanges avec les sœurs franciscaines du 17ème et un prêtre de Sainte Odile. Puis, à nouveau, interpellée par ma voisine sur la ligne 7, paroissienne de Ste Marthe de Pantin par un « bonsoir Monseigneur », je découvre le lien avec Mgr Aupetit. Christelle, d’origine haïtienne a reçu l’onction de l’Esprit-Saint par l’archevêque à Saint Sulpice lors de la confirmation des adultes de la Pentecôte. Elle tenait à être là, comme les 2000 fidèles, conscients de ce moment grave que l’Eglise à Paris vivait avec le départ précipité de son archevêque, Mgr Aupetit, homme de foi, serein dans l’épreuve.
+ Jean-Yves Riocreux, évêque-émérite de Guadeloupe
Vendredi 10 Décembre 2021