Mariage gay, divorcés remariés, avortement… le pape François s’empare des sujets d’actualité

Le pape François salue la foule qui s'est rassemblée à l'aéroport de Ciudad Juarez, avant son départ pour Rome, mercredi.

En route vers Rome, après son périple mexicain, le pape François s'est livré à une heure de dialogue avec les journalistes.

Envoyé spécial au Mexique (Le Figaro)

Le pape François salue la foule qui s'est rassemblée à l'aéroport de Ciudad Juarez, avant son départ pour Rome, mercredi.

En quittant le Mexique pour rejoindre Rome, le pape François, malgré sa fatigue, s'est livré pendant une heure à une dense conférence de presse. Le point fort fut sa réponse à une question sur le candidat américain Donald Trump, qui affirme vouloir construire un mur entre les États-Unis et l'Amérique latine et renvoyer 11 millions de clandestins. Le pape François a été très direct: «Une personne qui ne pense qu'à faire des murs et non des ponts, n'est pas chrétienne. Ce n'est pas dans l'Évangile. Il faut vérifier s'il a vraiment dit cela. Un pape ne se mêle pas de politique interne.»

Pressé de s'exprimer sur le débat parlementaire italien en cours à propos du mariage gay et l'adoption d'enfants par ces couples, François a redit qu'«il ne se mêle pas de la politique italienne. Le pape est pour tous. Il ne peut donc pas se mêler de la politique interne d'un pays, ce n'est pas le rôle du pape. Quant aux parlementaires catholiques, ils doivent voter selon leur conscience… bien formée.» Enfin, sur la question homosexuelle, le Pape a tenu à «répéter» ce qu'il avait dit lors des JMJ de 2013 «et qui se trouve dans le catéchisme de l'Église catholique» mais sans le redire toutefois. Il avait alors prononcé cette fameuse phrase «qui suis-je pour juger?».

Quand il lui fut demandé ensuite s'il allait accorder la communion aux divorcés remariés, il a confirmé la publication de l'exhortation post-synodale, «avant Pâques». Ce document va «reprendre tout ce que le synode a dit». Pour ce qui est des divorcés remariés «le mot-clé – et je le rependrai comme l'a utilisé le synode – est “d'intégrer” dans la vie de l'Église, les familles blessées, les familles remariées. Mais sans oublier les enfants qui sont les premières victimes de tout cela». En insistant aussi sur la «préparation au mariage» sur laquelle François s'est beaucoup arrêté.

Puis relance de la question: «Allez-vous autoriser les divorcés remariés à communier?» Réponse: «Ceci est une chose qui vient à la fin… “Intégrer” dans l'Église ne signifie pas communier. La communion n'est pas une récompense que l'on réclamerait, mais il s'agit d'un travail d'intégration où toutes les portes sont ouvertes. Mais, on ne peut pas dire, d'ores et déjà, “ils peuvent communier”. Ce serait une blessure, y compris pour ces mariages et pour ces couples, car cela ne leur ferait pas faire ce chemin d'intégration.»

Questionné sur la polémique récente autour de l'amitié entre Jean-Paul II et une philosophe américaine, François n'a manifesté aucune surprise: «Je connaissais cette relation d'amitié entre saint Jean-Paul II et cette personne. Je dirais ensuite qu'un homme qui ne sait pas avoir un bon rapport d'amitié avec les femmes – je ne parle pas des misogynes qui sont des malades – est un homme à qui il manque quelque chose.»

Témoignant de sa propre expérience, le Pape a ajouté: «Quand je demande un conseil, je demande à un collaborateur, à un ami, mais j'aime aussi entendre l'avis d'une femme. Elles te donnent tellement de richesses. Elles regardent les choses d'une autre façon.» Ajoutant: «Une amitié avec une femme n'est pas un péché. Une amitié! Un rapport amoureux avec une femme qui n'est pas ta femme est un péché. Mais le pape est un homme. Il a besoin de la pensée des femmes. Et le pape a un cœur qui peut avoir une amitié saine, sainte, avec une femme. (…) Il ne faut donc pas avoir peur. Mais les femmes ne sont pas encore assez considérées et nous n'avons pas encore compris le bien qu'une femme peut faire au prêtre, à la vie de l'Église dans le sens d'une aide et d'une saine amitié.»

Interrogé enfin sur le recours à l'avortement ou la contraception dans le cadre de la lutte contre le moustique Zika, en tant que «moindre mal», le Pape a aussitôt rétorqué: «L'avortement n'est pas un mal mineur, c'est un crime. C'est un mal absolu. Tuer pour faire disparaître l'autre, c'est ce que fait la mafia. Quant à éviter la grossesse, Paul VI dans une situation difficile en Afrique, avait permis à des religieuses d'utiliser des contraceptifs parce qu'elles avaient été menacées de viol.» Recommandation donc de François: «Il ne faut pas confondre le mal, en soi, d'éviter une grossesse et celui de l'avortement. L'avortement n'est pas un problème théologique c'est un problème humain, médical. On tue une personne pour en sauver une autre, dans le meilleur des cas, ou pour la faire disparaître. C'est un mal en soi, mais ce n'est pas un mal “religieux”, c'est un mal humain, car tuer est condamnable. En revanche, éviter une grossesse n'est pas un mal absolu. C'est clair dans certains cas comme ceux que j'ai nommés en parlant de Paul VI.»

Dernier sujet, le traitement des affaires de pédophilie dans l'Église catholique par les évêques: «Un évêque qui change un prêtre dans une autre paroisse en sachant que c'est un cas de pédophilie est un inconscient. Il doit présenter sa démission.»