La Fraternité en marche avec Opéra Mémoire #3 !

“L’Histoire est dans nos veines, ne l’oublions jamais, et si l’on veut que demain soit meilleur qu’aujourd’hui pour les familles, les enfants et les jeunes qui sont en advenir, il convient qu’aujourd’hui nous évoquions les souffrances, les combats et les épreuves d’hier, non seulement dans notre vie chrétienne, mais aussi dans nos rencontres culturelles, sociales, artistiques, sportives afin que la fraternité et l’écologie nous portent à l’espérance. Ainsi notre Gwadloup deviendra levain dans la pâte humaine de la Caraïbe. Croisons nos générations dans ce mouvement et valorisons les rencontres qui se vivent partout dans nos communes et nos régions durant ce temps pascal pour que s’éclaire positivement l’avenir et que le pessimisme ne prenne pas le dessus !” Cette harangue du vénéré père Oscar Lacroix en 2004 lors d’une rétrospective historique et artistique sur les Marches des Esclaves à Petit-Canal, en a marqué plus d’un et fait tache d’huile aujourd’hui.

 

Ce week-end des 4 et 5 mai, en effet, c’est un peu partout en Guadeloupe que des foules (dont des familles et de nombreux jeunes) se sont retrouvées pour des concerts, des spectacles, des rencontres artistiques sur les places publiques, dans des sites historiques ou le long des boulevards afin que la joie communicative et la vraie liberté prennent le pas sur les invectives, les spots des réseaux sociaux, les pugilats et les violences qui voudraient prendre le dessus même chez nous. Il en a été ainsi à Basse-Terre et dans maints endroits. Magnifiques rencontres et fêtes humaines qui n’ont pas été ternies par le mauvais temps !

Au Moule, ce samedi 4 mai au soir, “l’Opéra Mémoire#3” proposait un parcours mémoriel et musical pour une découverte sublimée du patrimoine portuaire du Moule. Il s’agissait de partir du Fortin, pour arriver à l’espace Wizosky : à chaque étape une explication historique très pédagogique était proposée par l’association Eclats de Quartiers en coopération avec le groupe Métis’Gwa qui, de son côté, fait un travail d’expression corporelle extraordinaire permettant à de nombreux professionnels mais aussi jeunes de  Guadeloupe de s’exprimer et de transcender ainsi tout le bouillonnement intérieur qui couve et fulmine en chacune et chacun de nous. C’est ce que m’expliquait une grand-mère moulienne à la fin du parcours : “j’en ai beaucoup appris ce soir, il ne faut pas oublier vous savez… mais ce que je trouve bien c’est que de nombreux jeunes sont là et leur participation artistique en tous genres prouve qu’on peut améliorer la société de demain sans oublier les souffrances d’hier… pour ne pas reproduire les mêmes bêtises n’est-ce pas !”… Quelle sagesse !

 

Superbe cadre de la Batterie en effet (espace Wizosky) éclairé et décoré avec génie et qui a permis un concert de haute qualité avec Angerick William, contre-ténor étonnant et valeureux, et Clara Gustave dit Duflo, jeune lauréate soprano talentueuse, qui ont rempli d’émotion toute l’assistance. Grégory Beer était au piano. L’Ave Maria de Gomez a tiré les larmes des yeux de beaucoup : tandis que Didier Juste, percussionniste de talent, accompagnait génialement la musique. “J’aime quand le ka accompagne le lyrique et la musique classique subtilement… ça donne un souffle nouveau et unifie les générations entre elles !” faisait remarquer un jeune membre de l’association Éclats de Quartiers. Après ce moment de grâce, plusieurs comédiens acrobates de grands talents ont interprété gestuellement sur le rythme enflammé du ka des figures à couper le souffle “l’âme se met en mouvement pour exprimer son for interne dans des figures parfois acrobatiques d’une grande subtilité” comme me l’expliquait un jeune père de famille qui poursuivait : “on est loin des violences stériles de nos cités et de nos quartiers… que des jeunes viennent en bord de mer comme ce soir relire l’histoire de notre peuple et s’exprimer ou par la musique (le ka), le chant ou l’expression corporelle et nos sociétés iront mieux !” Belle conclusion en effet ! 

Jean-Marie Gauthier