Education : A la source de Don Bosco avec le Père Jean-Marie Petitclerc

De passage en Guadeloupe, le Père Jean-Marie Petitclerc a permis d’aborder les clés de l’éducation renouvelées pour aujourd’hui par les Salésiens

De passage en Guadeloupe, le Père Jean-Marie Petitclerc a permis d’aborder les clés de l’éducation renouvelées pour aujourd’hui par les Salésiens. La conférence qu’il a donné ce samedi 17 février à 16 h dans la chapelle du site de saint Jean Bosco a été d’un grand intérêt pour la centaine de personnes qui ont eu la chance et qui ont fait l’effort de venir l’écouter.
 

D’emblée, il plante le décor dans un style vif et alerte : « Dans notre société post-industrielle, la révolution culturelle à l’échelon planétaire par le numérique et les nouveaux moyens de communication qui envahissent tout, n’est pas sans poser question ! »
Notre capacité à éduquer est plus que jamais liée à la qualité de la relation. « Saint Jean Bosco en son temps a réintroduit la dimension affective dans l’éducation. La négation de la dimension affective dans l’éducation aujourd’hui est un danger car : sans affection pas de confiance, et sans confiance vraie pas d’éducation » tonne Jean-Marie Petitclerc.

« La pédagogie de terrain prônée par Jean Bosco en son temps retrouve toute sa véracité aujourd’hui. Destiné à être paysan obligatoirement de par ses racines qui ne lui laissaient pas le choix, il pensait que chaque jeune doit construire sa vie en fonction de sa vocation. Emu par la violence qui entoure la vie des jeunes des quartiers industriels en devenir de Turin, il a l’intuition que seule la douceur arrivera à contrer cette agressivité négative qui ronge la vie des jeunes. Il devient prêtre, et regroupe des jeunes désœuvrés dans des maisons dont il cultive un vrai climat audacieux de compréhension et d’entraide (par le sport, l’art, la formation professionnelle).» Jean Bosco s’appuiera toujours sur une pédagogie de l’expérience dans laquelle le jeune ne peut que découvrir ses talents, et aussi sur une pédagogie fondée sur la « présence » : apprendre à rejoindre les jeunes là où ils sont, non pas « faire venir » mais « aller vers » (premier outil dans cette pédagogie le jeu, le sport). Pour Jean Bosco : « notre pédagogie doit être au service des jeunes, elle doit être une réponse aux besoins des jeunes. Par exemple donner des responsabilités à de grands jeunes vis-à-vis de plus jeunes. Le tutorat qui se fait aujourd’hui à ce niveau est bien timide ». Petit crochet par la prévention de la radicalisation : « mais que faisons-nous avant pour empêcher d’en arriver là ? » dit Jean-Marie Petitclerc qui est un adepte aujourd’hui de la médiation sociale pour tisser des liens et empêcher les barrières, les incompréhensions, la violence. Il cherche à faire bouger les lignes dans de nombreux ministères à ce niveau.
 

 

La trilogie éducative fondatrice aujourd’hui tient en ces termes chez les Salésiens  : croire (confiance) – espérer (espoir) – aimer (alliance). L’autorité ne peut s’exercer qu’à partir d’une crédibilité (la cohérence entre le dire et le faire). Ainsi le jeune reprend confiance en lui, et il peut avoir confiance en l’autre. « La confiance est un moteur à trois temps, ajoute Jean-Marie Petitclerc. Faire confiance. Avoir confiance. Prendre confiance. On affronte une difficulté quand on mémorise une réussite. »

Des clés pour aujourd’hui : Education et Espérance commencent par le même mot : ne jamais gémir sur son temps. « L’exemple de la graine et de l’arbre est très instructif, insiste le père Petitclerc. On transmet l’héritage à la graine, pour que le jeune éclose, invente, s’invente et devienne l’arbre librement avec toute l’eau qu’on lui aura donnée. Si on voit déjà l’arbre on impose, si on ne voit que la graine on risque de marcher dessus. La graine pousse toute seule, l’éducation est affaire d’arrosage et d’espérance ! » Le principe de précaution est redoutable dans l’éducation. Il n’y a pas de risque zéro dans l’éducation. Une éducation sans risque est la plus risquée qui soit, car le jeune ira au risque extrême.

Pour l’éducation de la foi, il en va de même. Utiliser la pédagogie de l’alliance par l’agape (réciprocité des gratuités). Dans la foi, l’important n’est pas que le jeune soit aimé, mais se sache aimé. Jean-Marie Petitclerc évoque la figure de Dominique Savio élevé à l’école de la responsabilité de Jean Bosco : faire comprendre le bien-fondé de la règle pour y adhérer. L’art de toute éducation chrétienne est l’art du positionnement : conjugaison de l’amour et de la loi (respect). Eduquer en évangélisant. Ou Evangéliser en éduquant. Tout est lié ! Une pédagogie de l’écoute et du dialogue : transmettre la foi c’est transmettre que Dieu croit au jeune (pour un catéchiste), en notre enfant (pour un parent). La foi il faut la vivre. Belle exemple de notre pape François qui nous montre la voie pour aller jusqu’aux périphéries, et ce synode des jeunes qu’il entreprend en Eglise pour rejoindre même les jeunes qui ne croient pas mais qui ont leur mot à dire et qui ne doivent pas être oubliés. « Actuellement je sors beaucoup en mer avec les jeunes de mes quartiers difficiles car la mer c’est l’école de la vie : école de la nature, apprendre à faire équipage, respecter les règles, immensité de Dieu en vrai… et les jeunes aiment s’y surpasser, conclut Jean-Marie Petitclerc ».

Le temps a passé trop vite. Tous les adultes présents, et les nombreux jeunes avaient beaucoup de questions sur : la résilience, la famille si bousculée actuellement, les addictions de toutes sortes, la radicalisation… Père Jean-Marie Petitclerc n’a rien esquivé, mais a dit qu’il reviendrait pour expliquer et échanger davantage. La messe dominicale a magnifiquement conclu cette rencontre porteuse d’espérance pour toute notre jeunesse de Guadeloupe.
Jean-Marie Gauthier